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dimanche 14 mai 2017

RECORDS BATTUS ET BIJOUX DE FAMILLE

Et pendant qu’obnubilés par l’élection pestilentielle nous votions Macron, Le Pen ou blanc, ou pas, et que s’agitaient les haineux fantoches, la vraie vie continuait.
Jusqu’à quand ?
Hypnotisés par les anecdotes, nous oublions sans cesse l’essentiel.
Et nous le faisons sinon consciemment, du moins volontairement, non seulement parce que nous ne savons comment résoudre les problèmes que nous ne cessons pas de nous créer, mais parce que nous n’avons pas vraiment envie de les résoudre tant ils remettent en cause nos chers conforts, l’intellectuel et le matériel.
Nouveaux Gribouilles, nous nous croyons raisonnables parce que nous poussons toujours plus loin la schizophrénie dans laquelle nous avons pris la douillette habitude de nous réfugier.
Pendant que la nature grâce à nous devient folle, nous battons sans cesse nos propres records de bêtise, nous enfonçant chaque jour davantage dans un délire suicidaire dont nous n’avons même plus conscience tant nous sommes devenus capables de nous aveugler nous-mêmes…
Plutôt que d’affronter la réalité, nous voulons nous rassurer en fermant les yeux pour écouter les joueurs de flûte et nous laisser mener par ces beaux parleurs, moutons qui lèchent la main du berger qui les mène à l’abattoir.
Il faut être optimiste, me direz-vous peut-être. De quel optimisme parlons-nous ? De celui qui fait prendre à chacun de nous le risque d’agir, ou de celui qui se défausse sur des « responsables » qui veulent tout changer pour que rien ne change ?
Ça fait 50 ans qu’il faut être optimiste et « riscophile », pour quel résultat ?
1% = 99% ! Warren Buffet a certes de bonnes raisons d’être optimiste, il est en train de gagner la guerre qu’il nous fait, et vous venez d’élire celui qui vous la fait.
Vous allez en avoir sacrément besoin, de votre bel optimisme bien propre sur lui !
Cet optimisme-là n’est que le faux-nez de la lâcheté et de la corruption qui achèvent de détruire une « civilisation » gangrenée par d’insoutenables contradictions et dont l’implosion est déjà en cours, dans le déchaînement progressif d’une barbarie planétaire.
Voyez ci-dessous, c’est édifiant.
Jusqu’où irons-nous ? Tous les espoirs sont permis.
Après tout, il y a encore les législatives…
On va pouvoir continuer à regarder le doigt pour ne pas voir la lune.
Elle est pas belle, la vie ?

Tous les indicateurs du réchauffement climatique sont au rouge

 
RESTE AVEC MAMAN, MON BIJOU !

« Comble de mauvais goût ou signe d’une perte absolue du sens des réalités ? Il a fallu quelques vérifications avant de présenter ici cette information qui semble proprement incroyable : une société artisanale australienne, Baby Bee Hummingbirds, propose de transformer les embryons surnuméraires en bijoux pour leur donner une fin « digne ». Non, ce n’est pas un mauvais canular ni un fake news : il y a réellement des familles, des mères qui font fabriquer des bagues ou des pendentifs à la suite d’une fécondation in vitro pour garder sur elles des embryons qui n’auraient pas été utilisés pour obtenir une grossesse.

Le pire, c’est qu’il ne s’agit pas de leur part d’une option « ultralibérale » ou « mercantiliste » comme on l’entend souvent dire à propos des évolutions de plus en plus surréalistes de la culture de mort. Sincèrement attachées à ces plus petits des tout-petits dont elles savent bien qu’il s’agit de minuscules êtres humains, ces mamans cherchent en quelque sorte à les honorer, peut-être pour ne pas vivre avec l’atroce conscience de les avoir fait fabriquer pour les faire tuer, au cours d’une procédure qui se moque largement de la valeur unique de la vie humaine.

Baby Bee Hummingbirds crée des bijoux à partir de matériaux humains

La société Baby Bee Hummingbirds a été créée il y a trois ans par une Australienne qui était à la fois sage-femme et créatrice de bijoux. Voyant que beaucoup de jeunes mères aiment à garder un souvenir de la naissance de leur enfant, elle a lancé une ligne de bijoux en résine avec des inclusions plus ou moins appétissantes, depuis une première boucle de cheveux jusqu’à quelques gouttes de lait maternel ou des fragments de placenta. On pourrait appeler cela du nombrilisme fusionnel.

Baby Bee Hummingbirds propose également, pour la modique somme de 80 à 600 dollars australiens, des bijoux fabriqués à partir de cordons ombilicaux ou de cendres, en cas de fausse couche.

Mais si on a l’estomac retourné par ce genre de pratiques, ce n’est rien par rapport à « l’immortalisation » des embryons obtenus en éprouvette. Amy McGlade, fondatrice de la société, n’a pas eu l’idée toute seule : ce sont des parents qui l’ont sollicitée à la suite de procédures de fécondation in vitro qui s’accompagnent de la création d’embryons qui ne seront jamais implantés dans le sein d’une femme.

C’est ce que raconte le site australien destiné aux jeunes parents, Kidspot, en proposant l’exemple de Belinda et Shaun Stafford. Le couple qui essayait en vain d’avoir des enfants s’est tourné vers la procréation médicalement assistée. Au bout de six ans de multiples fécondations in vitro, ils sont aujourd’hui les fiers parents d’un garçon de quatre ans et de deux jumeaux de 21 mois — et d’un nombre plus important d’embryons surnuméraires. Il n’était pas question pour eux de les donner à un autre couple, ni de payer un abonnement annuel pour leur conservation par le froid : trop coûteux. Les détruire ? Inimaginable, constate la journaliste qui les a interrogés. Les Stafford se sont donc tournés vers le recyclage artistique de leurs tout-petits.

Des embryons surnuméraires portés en sautoir

« Aujourd’hui Mme Stafford a tous ses bébés auprès d’elle chaque jour – y compris sept embryons enfermés dans un pendentif en forme de cœur qu’elle porte près de son cœur à chaque moment », apprend-on. Elle a trouvé dans cette démarche une forme de paix et de réconfort : « Mes embryons étaient mes bébés – figés dans le temps. Lorsque notre famille a été complète, je n’avais pas le cœur à les détruire », explique-t-elle.

Amy McGlade, de son côté, est fière de son travail. A ce jour, sur les 4.000 pièces de bijouterie qu’elle a créées à partir de matériaux humains pour commémorer des naissances ou des grossesses, il y en a eu 50 faits à partir d’embryons : « Je crois qu’il n’y a aucune autre société au monde qui créé des bijoux à partir d’embryons humains, et je crois fermement que nous sommes les pionniers de cet art sacré. »

« L’art sacré » du macabre : c’est un massacre à grande échelle qui est ici mis en écrin, puisque les embryons surnuméraires, comme on dit, ne sont ici jamais que les déchets humains de procédures de fécondation artificielle par lesquels l’homme se rend maître de la vie et de la mort. Le raisonnement, comme toujours dans la culture de mort, est inversé et donc infernal : le vocabulaire aussi.

L’Australie, pionnière d’un nouvel « art sacré » infernal

« C’est très spécial parce que ces embryons signifient souvent la fin d’un voyage, et nous offrons une manière belle et significative de fermer la porte avec douceur… Quelle manière plus belle de célébrer votre don le plus précieux, votre enfant, qu’à travers un joyau ? C’est le souvenir éternel tangible d’un être aimé que vous pourrez garder pour toujours », ose dire Amy McGlade.

C’est un « projet parental » d’un nouveau genre, rendu possible par une technique de conservation des paillettes d’embryons qui permet en même temps de fixer leur ADN dans une sorte de petite tombe portative que la mère, cimetière ambulant, va pouvoir porter avec elle.

Ils ne savent pas ce qu’ils font. »

 REGARDEZ CE QUE JE FAIS, PAS CE QUE JE DIS !


AVANT LES LÉGISLATIVES, à propos du nouveau président, de ce qu’il représente et de ce qu’il compte réellement faire si nous lui en laissons le loisir, 5 articles de fond pour continuer un décryptage bien nécessaire à qui veut s’informer plutôt que d’avaler tout cru un storytelling débile destiné à l’aider à avaler dans la foulée … de grosses couleuvres !


Macron, un nouveau très ancien, ou L’art du rebranding


À droite toute ! La « société civile » de Macron


Macron, des réformes mortifères ?


Les inégalités à l’origine du malaise social


De la prise d’otages, par Frédéric Lordon

vendredi 12 mai 2017

ET SI ON REGARDAIT LA LUNE PLUTÔT QUE LE DOIGT ?

Comme le disait George Orwell au sortir de la Seconde Guerre mondiale, « lorsque les fascistes reviendront, ils auront le parapluie bien roulé sous le bras et le chapeau melon ».

Cet ensemble de textes publié sur mon blog de Mediapart le 6 mai, avant le second tour, il me semble utile de le mettre avant les législatives à la disposition des visiteurs du Globe de l’homme moyen, qui n’en méritera que mieux son nom !
Il s’agit de tenter de mettre en perspective cette consternante anecdote qu’a été l’élection pestilentielle avec l’ensemble des problèmes essentiels d’une humanité mondialisée en pleine frénésie d’autodestruction – comme vous pourrez le constater dans mon prochain billet.
Car ce qui m’a le plus frappé dans toute cette histoire shakespearienne revue et corrigée façon vespasienne, c’est l’absence totale de vision politique digne de ce nom partagée par presque tous les candidats et l’immense majorité des médias et des « commentateurs » de tout poil.
Un tel degré d’aveuglement ne peut être dû au hasard, et nous appelle à une radicale remise en question d’une vision du monde aussi répandue qu’obsolète. Terriblement ralentie par un autruchisme volontaire qui fait encore consensus pour beaucoup d’entre nous, la prise de conscience est d’autant plus urgente qu’elle est tardive. Si je pouvais y participer si peu que ce fût, je me sentirais un peu moins inutile et moins impuissant…


Ceux qui votent blanc ou s’abstiennent ont été l’objet depuis 8 jours d’attaques d’une virulence surprenante de la part d’une gauche-œufs de lump visiblement paniquée et s’abaissant à des oukases et des injures dignes… du Front National !
On nous accuse de faire le jeu de Le Pen et du FN, ce qui est totalement faux.
Nous refusons simplement d’entrer dans le jeu de bonneteau que nous impose l’oligarchie financière, grande spécialiste de ce genre de marché gagnant-perdant intitulé TINA et qui se résume à la célèbre formule : Pile, je gagne, face, tu perds.
Je souhaite donc éclairer notre position
– d’abord en fournissant quelques éléments d’information que les médias dépendant de ladite oligarchie se gardent bien de monter en épingle puisqu’ils informent sur ce qui se joue et sont donc de nature à contrarier leur communication (leur propagande en clair, un matraquage incroyable)
– ensuite en précisant ma position et en relayant quelques textes qui remettent les choses au point et les pendules à l’heure, qui est selon moi beaucoup plus grave encore que ne le pensent ceux qui prennent Macron pour un démocrate, puisque, comme c’était évident dès le départ, c’est bien lui qui sera élu, l’arbre FN ayant une fois de plus servi à cacher la forêt néo-libérale.

Si, ce que je comprendrais très bien, vous n’avez pas le temps ou l’envie de lire ces textes, qui constituent un mini-corpus dans lequel vous pouvez picorer ce qui vous intéresse, je me permets d’insister pour que vous regardiez la vidéo de l’entretien de quelques minutes accordé en 2012 par un cadre du Crédit Agricole à propos de ce qu’allaient faire Hollande et Macron après l’élection du redoutable ennemi de la finance.
C’est une vidéo que devraient voir tous ceux qui comme moi ont voté Hollande en 2012 et ceux qui s’apprêtent à voter Macron en 2017. Si après ça vous pensez encore être en démocratie, je ne peux plus rien pour vous !

LA « GAUCHE » FINANCIÈRE LA VÉRITÉ SUR HOLLANDE ET MACRON François Ruffin Cliquez sur ce lien : https://youtu.be/Wn72T4dTFho

Macron - Histoire d’une Haute Trahison - Les preuves accablantes
par François Ruffin (Merci Patron !)

Nous publions ici des documents qui ne devaient pas être portés à la connaissance du public.
Cette interview d’un financier du Crédit Agricole qui remonte au début de 2012 démontre clairement qu’il y a bien un complot de la Haute Finance depuis au moins cette date, pour imposer Macron. 
Ils veulent à présent tout le pouvoir politique, en plus du pouvoir économique, pour finaliser l’avènement du Nouvel Ordre Mondial. 
Macron est là pour achever le (droit du) travail, sous les ordres de la Haute Finance, pour une Haute Trahison de la France et des Français...
Grâce à la complicité active des politiciens, des journalistes, et la soumission pathétique d’une grande partie des Français eux-mêmes...


Voici maintenant ma position personnelle :

 PILE IL GAGNE, FACE NOUS PERDONS

Qui vote Le Pen collabore à l’émergence du Front National et au risque d’une prise de pouvoir par une extrême-droite fascisante.
Qui vote Macron devient de fait le collabo des banques qui ont déjà pris le pouvoir et sont en route à travers leur dernier avatar, EM, vers le pouvoir absolu auquel la France reste un des obstacles.
Nous ne pourrons pas dire ensuite : Je ne savais pas, comment aurais-je pu savoir ?

LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ
Personne ne me convaincra d’aller voter si je ne le veux pas, et de mon côté, je n’ai pas l’intention d’essayer de convaincre qui que ce soit, non par indifférence, loin de là, mais par simple respect.
Car le prosélytisme m’a toujours plus que gêné, il me choque. Convaincre, c’est la plupart du temps vaincre un con, et cela suppose de toute façon qu’il y ait un con vainqueur et un con vaincu.
Que vaut la pensée de quelqu’un qui n’a pas su se convaincre lui-même ? Tenter de convertir autrui, c’est toujours d’une certaine façon le mépriser en croyant détenir une vérité qu’il ne saurait trouver lui-même. Tout l’objet de la maïeutique socratique consiste à faire en sorte que la personne découvre par elle-même sa part de vérité.
Échanger, débattre, oui, témoigner de sa petite vérité individuelle, absolument. Témoigner est un droit, et selon moi un devoir. Cela exclut de hurler avec les loups qui nous invitent à rejoindre leur vérité comme si c’était forcément la nôtre, qu’ils soient d’extrême-droite ou qu’ils se prétendent de gauche.
Penser par oukases comme le font les belles âmes qui nous enjoignent de voter Macron pour des motivations qui me paraissent en fin de compte tout aussi inspirées par leurs intérêts bien compris que par la morale à géométrie variable dont ils se gargarisent, je m’y refuse.

DÉBOUSSOLÉS ?
Comme souvent quand leur « raison » n’a plus de prise sur une réalité qui a évolué à leur insu, ceux d’entre nous qui se croient « raisonnables » deviennent fous furieux. Leur logiciel ne fonctionnant plus, saisis de panique, ils se mettent à dire et faire n’importe quoi.
Leurs analyses se focalisent aujourd’hui sur des conséquences (le FN) dont l’éradication restera impossible tant qu’on ne remédiera pas à leurs causes (notamment la mondialisation libérale-nazie et la façon dont les « élites » gouvernantes françaises ont instrumentalisé le FN comme repoussoir pour pérenniser leur pouvoir).
Ce qui se passe actuellement en France n’est qu’une partie d’une catastrophe en cours déjà bien avancée : l’autodestruction de l’humanité par la mondialisation néo-libérale. À l’échelle mondiale, au moment où l’humanité a presque achevé de scier la branche sur laquelle elle est assise, le FN n’est qu’un épiphénomène, l’un des symptômes d’une pandémie en plein essor.
Le « populisme » dénoncé avec une perversité dans le culot absolument effarante par les tenants du système oligarchique me semble être d’abord une très logique réaction collective inconsciente à la perception très concrète du désastre actuel, d’où le fait qu’il se répand comme une traînée de poudre un peu partout dans les pays dits développés.
En ce sens, nos débats de ces jours derniers me semblent à la fois ridicules et tragiques. Nous regardons le doigt à la loupe pendant que la lune nous tombe dessus. Ce que je crois être l’inconscient collectif, comme toujours beaucoup plus conscient que notre conscience, perçoit ce danger que nous refusons de voir. C’est le coup du Titanic : on a le pressentiment, l’inconscient nous avertit, des indices viennent renforcer notre intuition, mais par bêtise, par inertie, par arrogance, on chausse les lunettes roses de la raison radotante, des idées reçues et du consensus mou (« Ça ne peut pas nous arriver, pas à nous quand même… »).

UN ENJEU PLANÉTAIRE
Dans le débat d’hier entre les deux représentants de l’inhumanité, pas un mot, pas un seul, sur l’écologie, rien sur le réchauffement climatique. Curieuse conception de la sécurité !
Pratiquement rien sur nos institutions désormais mortifères qui prennent l’eau de toutes parts et préparent les fuites en avant de la révolution ou, pire, de la dictature, déjà partiellement mise en place.
Mélenchon n’est pas parfait mais si j’ai fini par voter pour lui, c’est qu’il est à mon avis le seul à avoir largement compris ce qui se passe réellement et à avoir tenté de replacer le cas particulier de la France dans le cadre mondial dont il dépend, afin d’essayer de trouver de vraies solutions d’ensemble.
Ce qui est en jeu aujourd’hui, au-delà du FN, au-delà des migrants, c’est notre sort à tous. Là est la question. Alors assez de cet apitoiement obscène sur « ces pauvres migrants » dont nous acceptons en fait sans bouger le petit doigt qu’ils soient traqués, enfermés, déportés, noyés, expulsés, alors que ceux qui souhaitent rester en France ne demandent qu’à s’intégrer et se mettre au service du pays (je parle ici d’expérience, à la fois ancienne et récente).
Que les bonnes consciences cessent de se draper dans des principes qu’elles ne respectent que quand ça les arrange ! Qu’elles cessent, du haut de leurs certitudes intéressées, de nous enjoindre de voter pour le moins pire sous peine de haute trahison ! Nous sommes en plein naufrage, savoir s’il faut se jeter directement à l’eau ou se battre pour monter dans une chaloupe bondée qui coulera dès sa mise à l’eau, c’est jouer les Gribouille.
Choisir Macron c’est à mes yeux ne pas voir que la bête immonde qui à juste titre nous fait à la fois peur et horreur a muté, et que sous une forme nouvelle, plus habile et insidieuse, elle est déjà dans la bergerie, d’où elle nous tend le piège du chantage antifasciste.

ÊTRE ANTIFASCISTE AUJOURD’HUI, c’est refuser non seulement les sursauts du fascisme d’hier mais l’hégémonie destructrice du néo-libéralisme actuel. Quoi de plus authentiquement fasciste que le "There Is No Alternative" systématique qui exclut de fait toute possibilité de démocratie pour imposer la loi, non de la jungle, qui est nettement plus civilisée, mais du profit, de l’argent-roi, lequel a toujours eu partie liée avec le fascisme ?
Hitler ne serait jamais arrivé au pouvoir s’il n’avait été dès le début soutenu par l’oligarchie industrielle et financière allemande, celle-là même qui avait soutenu l’infâme Ludendorff quand il avait à l’aube de la première guerre mondiale théorisé et systématisé la notion de guerre totale qui allait porter de si beaux fruits par la suite.
Depuis deux cents ans, à la lumière de Lumières beaucoup moins éclairantes que ne le croient encore des rationalistes mécanistes d’autant plus manipulés par leur inconscient qu’ils ne veulent pas entendre parler de lui, les apprentis sorciers que nous sommes n’ont cessé de jouer avec le feu en tous domaines. Selon les lois de la thermodynamique, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. Parce que nous n’avons pas su ni voulu le gérer, ce que nous appelons souvent imprudemment le progrès nous revient de toute part, boomerang irrésistible des conséquences imprévues, en pleine figure. Le cauchemar est en route, mais il est réel et il ne suffira pas de se réveiller pour le dissiper.
C’est entre autres pourquoi il est exclu que je vote Macron. Il y a à mes yeux un monde entre ce que dit Macron et ce qu’il a fait et veut faire. En ce sens, Le Pen et lui se valent, loups déguisés en bergers. Libre aux amateurs de sensations libérales fortes de jouer les Petits Chaperons rouges, très peu pour moi, merci, j’ai déjà donné.

Et puis il y a eu LE « DÉBAT ». VOUS AVEZ DIT DÉBAT ?
Je croyais connaître la peur. J’avais tort. Je sais depuis hier soir ce qu’est la peur. Le débat entre les deux candidats qu’a réussi à imposer l’oligarchie au pouvoir m’a d’abord mis dans une colère noire. Qui cachait en fait la terreur qu’a provoqué en moi ce débordement réciproque de haine. Aucun de ces deux personnages répugnants n’aura mon vote.
Alain Sagault

Je voudrais rappeler maintenant que les mots disent beaucoup plus de choses que nous ne le croyons et qu’ils constituent parfois des prisons mentales dont on ne sort qu’en en prenant conscience :

STYLE JOURNALISTIQUE ET DÉMOCRATIE

Notre époque de délire normalisateur semble autoriser ceux qui considèrent détenir la vérité et la science infuse à multiplier les injonctions souvent paradoxales et arguments d’autorité irrecevables par essence (Il faut voter Macron, il faut faire barrage à Le Pen, il faut se laver les dents trois fois par jour, il faut manger cinq fruits et légumes par jour).
Ainsi de ce titre paru ce 4 mai dans Mediapart, et qui a, je n’en doute pas, échappé en toute innocence et bonne foi à la conscience de ses auteurs :
« Ce qu’il faut retenir de deux heures et demie d’échanges tendus »
Il me semble intéressant de proposer à la suite de ce titre, typique des mauvaises habitudes inconsciemment prises par les médias, mais aussi par nous, simples particuliers, à la suite des intellectuels de pouvoir (voir la tournure infantilisante et culpabilisante si répandue depuis quelques années chez les « experts » de tout poil : « Il faut savoir que ») un texte du créateur du Seitaï, Haruchika Noguchi commentant Tchouang-Tseu à sa manière si personnelle et pertinente :
« Notre vie est limitée, or il n’y a pas de limite aux « il faut » et « il ne faut pas », et si, avec nos limites, nous essayons de nous conformer aux « il faut » et « il ne faut pas » qui sont sans limites, tout ce qui va nous rester c’est l’angoisse d’être incapables de nous y conformer. Pourtant, les gens courent toujours après les « il faut » et « il ne faut pas ». Et leur anxiété augmente.
On suit la voie de l’hygiène avec comme seul résultat la multiplication des « il faut » et « il ne faut pas » ; les « il faut » et « il ne faut pas » auxquels les gens doivent faire attention se multiplient de plus en plus ; et alors l’angoisse d’avoir à observer ces règles conjuguée avec la peur de ne pas en être capable rend les gens toujours plus timorés et abattus.

Quand les « il faut » et « il ne faut pas » contrôlent l’activité humaine, alors les êtres humains ont déjà forgé des chaînes pour eux-mêmes. La connaissance est une arme pour les êtres humains, et un pouvoir pour l’accomplissement de leurs intentions. Mais quand on accumule les connaissances et que la liberté des êtres humains est restreinte, les gens deviennent incapables de vivre avec vivacité à cause des « il faut » et « il ne faut pas », un peu comme les bois d’un cerf deviennent pour lui une gêne. Et alors il n’y a rien de mieux à faire que de se libérer en tranchant cette connaissance et en la jetant. »
Je soumets ce texte aux donneurs de leçons patentés et autres adjudants ratés en leur suggérant de dire leur chapelet en méditant sur un « Il faut » plus légitime et plus sain que les leurs : Faut pas trop faire chier…


À propos de la nature de l’abstention, un texte qui remet les choses en perspective dans le contexte actuel :

 L’abstention est-elle une idiotie ?

Un point de vue assez proche du mien et que je vous soumets donc ! :

 NE NOUS SOUMETTONS PAS !

Par Henri Pena-Ruiz, Philosophe, écrivain — 30 avril 2017 à 15:22
 
Seule la France Insoumise a su proposer une véritable alternative face à la montée du lepénisme, mais il faut désormais compter sur le troisième tour : les législatives. Pour faire barrage contre l’extrême droite et éviter un score à la soviétique pour Monsieur Macron, adepte du 49-3 et des ordonnances.

Selon Montesquieu le propre du despotisme est de gouverner à la peur. Or qui veut nous faire peur aujourd’hui ? Ceux qui prétendent que le FN est aux portes du pouvoir alors qu’il sera loin d’avoir la majorité à l’Assemblée Nationale, et par conséquent ne pourra pas gouverner. Les amis de M.Macron, avec sans doute l’appui d’un président qui a trahi ses promesses pour se faire élire, mettent en scène leur rêve, en forme de ruse machiavélique. Orchestrer la peur de voir Mme Le Pen gouverner afin de construire pour leur candidat une « majorité présidentielle » écrasante. Et disposer ainsi d’une majorité nette à l’Assemblée nationale pour continuer la politique d’un quinquennat sinistre.
C’est typiquement la logique de la cinquième République, hélas aggravée naguère lorsque Monsieur Jospin crut devoir inverser le calendrier électoral. La monarchie présidentielle prenait ainsi davantage encore le pas sur l’élection des représentants du peuple, ligotant celui-ci dans des alternatives mystifiantes. Quant à la lutte contre le FN, certains feraient bien de balayer devant leur porte. Qui donc a cyniquement joué sur un score élevé du FN pour substituer la peur à tout inventaire critique d’une politique de trahison fondée sur une tromperie initiale ?

Non au chantage à l’apocalypse
Sauver la démocratie ? Allons donc ! Monsieur Macron annonce son intention d’aggraver la Loi El Khomri par ordonnances…pendant les vacances d’été, afin d’éviter toute contestation. Jolie façon de réaliser la « démocratie participative » ! Naguère il proposait aux jeunes d’avoir pour seul idéal de devenir milliardaires. Sans doute en exaltant un système « Qui produit la richesse en créant la misère » (Victor Hugo). Belle profession de foi humaniste !
Ouvrons les yeux. Ras-le-bol de ce chantage à l’apocalypse pour désespérer encore une peu plus les laissés pour compte du néo-libéralisme et de la « concurrence libre et non faussée ». Avant de pleurnicher sur la montée du lepénisme, il serait bon de s’interroger sur ses causes et de proposer une véritable alternative, comme le fait La France Insoumise. Qui vient de faire reculer le score de Marine Le Pen, sinon Jean Luc Mélenchon ? Le score du FN est passé de 28 % à 21,5 % tandis que celui du candidat de la France Insoumise a atteint 19,6%.
Sa proposition de soumettre toute décision concernant le second tour à une réflexion collective des militants qui l’ont soutenu est toute à son honneur. Elle est en phase avec notre volonté de changer la politique par l’invention d’une sixième République. Elle répond à la complexité d’une situation qui mérite réflexion et délibération, à rebours de toute image d’Epinal. Ceux qui osent traiter Jean Luc Mélenchon de dictateur le calomnient, une fois de plus. Leur rage est d’ailleurs inconséquente. Tantôt ils lui reprochent son autoritarisme vertical, tantôt ils croient devoir s’indigner de sa refondation horizontale de la politique, soucieuse de faire parler le peuple. Il faudrait savoir !
Nous, fossoyeurs de l’Europe ? Une Europe construite à rebours de tous les idéaux de justice qu’elle était censée incarner. Victor Hugo inventa l’expression « Etats-Unis d’Europe », sur le mode confédéral d’une union des nations. Des nations libres dans une union libre, tournées vers le progrès social et la culture délivrée des inégalités économiques. Il doit se retourner dans sa tombe au regard de la caricature de son idéal par l’Europe actuelle. Une Europe néolibérale voulue par Jean Monnet, attachée à corseter les peuples dans la négation quasi irréversible des conquêtes sociales qui forcèrent le capitalisme à s’humaniser. Qui refuse la régression de civilisation que représente le credo du moins-disant social imposé par l’Europe actuelle ? Qui demande en Europe une harmonisation des droits sociaux par le haut ? La France Insoumise, avec das Linke, Podemos et Syrisa. Bref c’est la construction actuelle de l’Europe qui en creuse la tombe.
Monsieur Hollande avait promis de renégocier un traité européen, le TSCG. Il ne l’a pas fait. Et il ose maintenant reprocher à Jean-Luc Mélenchon de vouloir le faire ! Qu’a donné la litanie d’un changement intérieur de l’Europe ? Rien, car elle a sous-estimé l’emprise d’une finance mondialisée et elle a finalement abdiqué devant elle. Le terrible sort réservé au peuple grec en est la preuve. Relisons la mise en garde prémonitoire de Pierre Mendès-France contre cette orientation mortifère pour l’Europe. C’est notre acte d’insoumission qui réconciliera les peuples avec elle par une refondation politique, écologique et sociale.

De la souveraineté populaire
Par ailleurs, qui mène la bataille des idées contre le FN en expliquant le rôle des immigrés dans la reconstruction de la France, et en rappelant que les immigrés paient plus de cotisations qu’ils ne touchent de prestations ? Qui rejette le nationalisme d’exclusion inspiré par l’opposition du « eux » et du « nous » chère à Carl Schmitt ? Qui combat la thèse de Samuel Huntington selon laquelle les civilisations s’opposeraient et se hiérarchiseraient inéluctablement ? Qui ouvre la réaffirmation de la souveraineté populaire au niveau national à l’internationalisme, avec la promotion du progrès social pour tous les peuples ? La France Insoumise. Pour faire reculer les réflexes racistes ou xénophobes, ne nous contentons pas de condamnations moralisantes. Agissons sur les causes et déconstruisons les préjugés obscurantistes. Nous n’avons pas de leçons à recevoir des principaux responsables de la montée du FN !
« Populisme » ! Allons bon, encore un mot magique pour disqualifier sans argumenter ! Le propre du populisme de droite est de flatter le peuple et non de le servir. C’est d’ailleurs le sens littéral du mot démagogie, en grec ancien. Mais si défendre réellement les classes populaires c’est être populiste, alors soyons populistes. Par une telle défense, nous défendons également l’intérêt général. D’où la lutte contre la dévastation des droits sociaux et des acquis du programme du CNR, comme la Sécurité sociale et les services publics, et le refus de la déconstruction du code du travail à coup de 49-3 et bientôt d’ordonnances. Trêve de mots pièges et d’amalgames odieux entre les « deux extrêmes ». Un amalgame qui soit dit en passant banalise le FN puisqu’il lui donne le même statut qu’à la France Insoumise !

Le barrage à l’extrême droite ? Les législatives
Ensemble, en 2012, nous avions chassé la droite. Et pendant cinq ans nous avons eu la droite déguisée en gauche, avec l’exception honorable du Mariage pour tous courageusement promue par Christiane Taubira, réforme sociétale juste, mais qui n’aurait pas dû dispenser de l’attention à la question sociale. Il faut comprendre la désespérance du monde du travail, sans justifier pour autant n’importe quel vote protestataire. Je comprends qu’en l’état actuel des choses on puisse se sentir écartelé entre un vote blanc, improprement appelé « nul », qui marque le dégoût d’une pratique politique désespérante, et un vote Macron, posé un peu vite comme seule alternative à l’extrême droite. Les deux votes sont respectables, et je dénie à quiconque le droit d’en disqualifier un. Mais c’est désormais un troisième tour, celui des Législatives, qui permettra de dresser un véritable barrage contre l’extrême droite, et non un score à la soviétique pour Monsieur Macron, adepte du 49-3 et des ordonnances.
Un dernier mot sur l’incroyable faute déontologique et le manque d’esprit laïque du président de la République. Comment Monsieur Hollande a-t-il considéré les devoirs de sa fonction lorsqu’il a violé la réserve qu’il avait annoncé vouloir respecter, n’étant pas candidat ni chef de parti mais Président de tous les Français ? Ses accusations insensées, aux limites de la calomnie, sur la prétendue complicité de Jean-Luc Mélenchon avec Assad et Poutine, ou sa propension supposée dictatoriale, ont rompu l’égalité de traitement des candidats alors que la constitution lui faisait un devoir de la respecter. Décidément l’immunité présidentielle, elle aussi, devra être revue par la sixième République dans le cadre de la moralisation de la vie politique !
Dernier ouvrage paru : Dictionnaire amoureux de la laïcité, Editions Plon. 
Henri Pena-Ruiz Philosophe, écrivain



À propos de la nature du libéralisme actuel, voici quelques extraits d’un article paru dans Mediapart sur un essai collectif tout récent publié par un groupe de chercheurs :

ESSAIS

 « Échapper à la grande régression »

2 MAI 2017 PAR JOSEPH CONFAVREUX

Le coordinateur de ce livre collectif écrit en introduction :
« Tout ce qui avait pu être écrit, il y a presque vingt ans de cela, sur les répercussions, alors encore à venir, de la globalisation, s’est avéré pour l’essentiel exact, sans que la moindre leçon en soit tirée pour autant. »

« Face à Trump ou Clinton, incarnations réciproques d’une extrémisation droitière ou d’une faillite libre-échangiste, le philosophe juge qu’une « politique de gauche à opposer à ces deux-là devrait consister à élaborer des traités internationaux d’un genre inédit : des accords visant à contrôler les banques, à instaurer des critères écologiques précis, à protéger les droits des travailleurs, à garantir à tous de mêmes soins de santé, à protéger les minorités sociales et ethniques, etc. La grande leçon du capitalisme global, c’est que les États-nations ne peuvent faire à eux seuls le travail – seule une entité politique internationale d’un type inédit serait, peut-être, à même de brider le capital global ».
À ce programme déjà (trop ?) vaste, le philosophe Bruno Latour ajoute une nouvelle pierre, dans ce qui constitue la contribution la plus lumineuse de l’ouvrage, en explorant les contours du « nouveau régime climatique » qui « balaye depuis longtemps toutes les frontières et nous expose à tous les vents, sans que nous puissions construire de murs contre ces envahisseurs-là. Si nous voulons défendre nos identités, il va falloir identifier ces migrants sans forme ni nations qu’on appelle climat, érosion, pollution, épuisement des ressources, destruction des habitats. Même en scellant les frontières aux réfugiés sur deux pieds, jamais vous n’empêcherez les autres de passer ».
Pour le philosophe, nous sommes face à une situation, où, pour « reprendre la métaphore éculée du Titanic : les gens éclairés voient l’iceberg arriver droit sur la proue, savent que le naufrage est assuré, s’approprient les canots de sauvetage ; demandent à l’orchestre de jouer assez longtemps des berceuses pour qu’ils profitent de la nuit noire pour se carapater avant que la gîte excessive alerte les autres classes ! ». Cette configuration permet de comprendre que « ce que l’on appelle à partir des années 1980 la “dérégulation” et le “démantèlement de l’État-providence” ; à partir des années 2000 le “climato-négationnisme” et, surtout, depuis quarante ans, l’extension vertigineuse des inégalités, que tout cela participe au même phénomène : les élites ont été si bien éclairées qu’elles ont décidé qu’il n’y aurait pas de vie future pour tout le monde, qu’il fallait donc se débarrasser au plus vite de tous les fardeaux de la solidarité – c’est la dérégulation ; qu’il fallait construire une sorte de forteresse dorée pour les quelques pour cent qui allaient pouvoir s’en tirer – c’est l’explosion des inégalités ; et que pour dissimuler l’égoïsme crasse d’une telle fuite hors du monde commun, il fallait absolument nier l’existence même de la menace à l’origine de cette fuite éperdue – c’est la dénégation de la mutation climatique ».

Voici une très éclairante approche du dilemme scélérat qui nous est proposé, qui rme convient d’autant plus qu’elle rappelle opportunément les vertus du silence :

04/05/2017 10:24 PAR DIOGÈNE DE TOURS EN RÉPONSE AU COMMENTAIRE DE THEORTIE LE 04/05/2017 02:53
 

 
PUISSANCE DU SILENCE

LE « CHOIX DE SOPHIE » ET LE « SILENCE DE LA MER »

Vous connaissez toutes et tous, sans doute, l’argument dit du « choix de Sophie » : une jeune maman est prisonnière, aux mains d’un salaud quelconque (SS ou similaire, en n’importe quelle armée ou milice) qui la désire et qui a pouvoir de vie ou de mort. Elle a deux enfants, et le salaud lui dit qu’un seul enfant sur les deux peut être sauvé, et il lui demande de choisir lequel. Apparemment, la situation est sans issue pour Sophie : il lui faut répondre, mais sa réponse ne peut que la détruire à ses yeux en tant que mère. Et le salaud jouit atrocement du piège qu’il a ainsi monté.
Beaucoup d’esprits bavards ont glosé sur ce « choix de Sophie ». Peu ont reconnu que Sophie, de toutes façons, garde aussi le choix du silence, et que ce silence est - logiquement et moralement - le meilleur choix. Car, seul le silence protège l’infime chance qui lui reste, et qui peut à la fois la sauver pour elle- même, à ses yeux, et sauver ses deux enfants. Chance infime, oui, car le plus probable est, bien sur, qu’ils meurent tous les trois dans un délai plus ou moins court. La probabilité qu’elle et ses enfants meurent est la plus forte, quelle que soit ce qu’elle décide, vu les circonstances et le cynisme atroce du salaud dont il serait vraiment stupide de croire qu’il peut simplement respecter sa parole.
Comment, en effet, un salaud pourrait-il être crédible, sinon selon sa propre saloperie ? Un salaud jouit d’abord de sa puissance, et il ne se sent jamais aussi puissant que lorsqu’il tue. Sophie le sait. Sa puissance à elle est dans le refus de jouer à ce jeu pervers. Si elle et ses enfants meurent, il faut alors que cela soit du seul fait du salaud. Non de son fait à elle. Son silence, et seulement son silence, renverra au salaud sa responsabilité. Elle ne donc doit rien dire. Surtout ne pas répondre. Ne jamais dire un mot. C’est difficile, mais face au « silence de la mer », c’est le salaud – et lui seul - qui devra choisir. Et il aura perdu dans le plus ignoble de son désir : faire entrer Sophie dans le choix de tuer. Mais Sophie, paniquée, fait le choix. Elle sacrifie sa fille de 7 ans, voulant garder son fils. Le reste de sa vie sera un enfer, et elle ne saura même pas ce que deviendra son fils.
On ne prend jamais assez conscience de la puissance du silence face aux multiples situations où l’on nous impose de parler immédiatement, et de choisir une chose plutôt qu’une autre ; où on tente de nous faire le coup du « devoir », de choisir obligatoirement entre deux issues mauvaises. On veut souvent nous faire croire que le choix du silence est impossible. Mais c’est une tromperie répugnante : la vertu extraordinaire du silence est qu’elle renvoie à ceux qui l’ont plus ou moins manigancé la perversité originelle du choix imposé. Et le choix du silence, s’il est maintenu malgré toutes les pressions, n’est finalement pas plus risqué, loin de là, que de succomber à choisir soi-même le pire.
Imaginons ainsi un pays dont le roi est élu pour cinq ans avec pratiquement tous les pouvoirs, y compris celui de nommer lui-même les juges. Un tel pays, çà n’existe pas, évidemment, c’est juste pour donner un exemple de pire. Dans ce pays, imaginons que l’absurdité aille jusqu’à imposer le choix final du roi-pour- cinq-ans entre les deux candidats au trône arrivés en tête au premier tour de scrutin. Ces deux-là uniquement, même s’ils n’ont pas obtenu ensemble la moitié des voix ! Evidemment, croire une telle chose possible dans la réalité est le comble du pessimisme. Encore une fois, c’est juste pour renforcer par l’exemple du pire la pédagogie de l’opportunité du silence.
Allons donc encore plus loin dans l’imagination purement pédagogique : disons que l’un des deux candidats représente la fureur exacerbée, devenue malveillante, de ceux et celles qui sont réellement frustrés par les accaparements toujours plus grands, et eux aussi malveillants, de ceux et celles qui soutiennent l’autre candidat... Dans ces conditions on ne peut plus grotesques, absurdes (et heureusement invraisemblables) le choix par le vote ne semble plus que de poursuivre, par l’un ou par l’autre - « one more time » - le cercle vicieux opposant toujours plus les uns aux autres. Or, penser devoir voter ainsi, c’est oublier qu’il reste aussi le choix du silence. On peut encore choisir le silence qui montre de façon évidente, et impressionnante, ce que l’on pense au fond de ce « jeu de cons » électoral.
Certes, dans cette étude de cas ô combien théorique, grâce à Dieu, l’un ou l’autre des candidats sera officiellement le roi-pour-cinq-ans. Mais, le silence massif des électeurs aura parlé. On n’a jamais connu de roi dans l’Histoire - ni pour cinq ans, ni pour la vie - qui ait vraiment su comment répondre, sans craindre pour sa tête ou son cul, au peuple.

 
Le point de vue d’Onfray, avant le « débat » :

LE FIGARO : MICHEL ONFRAY : « CETTE ÉTRANGE PERVERSION QUI CONSISTE À NOURRIR LE MONSTRE LE PEN QU’ON PRÉTEND COMBATTRE »
28-04-2017
INTERVIEW - Le philosophe analyse les résultats du premier tour de l’élection présidentielle et notamment le score important réalisé par le Front national. Il considère que le parti de Marine Le Pen est moins combattu qu’utilisé comme épouvantail pour que rien ne change.
LE FIGARO. - En 2002, après l’accession de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle vous avez fondé l’université populaire. 15 ans plus tard, Marine Le Pen est au second tour. Êtes-vous surpris ?
Michel ONFRAY. - Pas du tout car ce qui a rendu possible la famille Le Pen depuis un quart de siècle que dure cette saga n’a été ni attaqué ni combattu. Au contraire : ce qui a généré son succès a même été amplifié. On ne combat pas cette résistible ascension par la diabolisation, mais en asséchant le marais qui nourrit leurs ambitions. En l’occurrence avec une politique vraiment de gauche en faveur des gens modestes.
Qu’est-ce qui explique cette étrange perversion qui consiste à nourrir le monstre qu’on prétend combattre ? Une raison bien simple : ceux qui tapent sur elle mais épargnent ce qui la rend possible font très exactement partie de ce qui la rend possible.
Je m’explique : quand Mitterrand est élu en 1981, le FN est en dessous de 1%. Aujourd’hui, Marine Le Pen arrive à la deuxième place du premier tour avec plus de 20% des suffrages et il faut que tous se liguent contre elle, droite et gauche confondues, pour qu’elle ne soit pas élue.
Marine Le Pen peut dire merci à nombre de gens qui l’ont rendue possible depuis si longtemps : à tout seigneur tout honneur, commençons par François Mitterrand qui, en renonçant à la gauche avec son tournant libéral en 1983 et en renonçant également à toute souveraineté, donc à toute possibilité de faire de la politique avec Maastricht en 1992, a vidé la gauche de sa substance et laissé les pleins pouvoirs aux marchés ; merci à tous les socialistes qui ont avalisé ce virage à droite de leur camp et voté « Oui » à Maastricht, dont un certain Jean-Luc Mélenchon ; merci au PCF qui , pour des raisons boutiquières (il lui fallait payer ses cadres et ses permanents...) s’est contenté d’une opposition verbale pendant qu’il collaborait la nuit à cette politique qu’il dénonçait le jour ; merci au même Mitterrand qui a promu comme nouveau modèle de gauche l’homme d’affaires bien connu des tribunaux et des gardiens de prison, Bernard Tapie, avec un message simple : l’argent est le dieu des temps moderne, le patron est son prophète et la gauche à son service ; merci à Serge July et, déjà, à Laurent Joffrin qui, en 1984, dans Libération , ont fait une mémorable opération marketing et politique avec une « une » intitulée : « Vive la crise ! » dans laquelle Yves Montand, un ancien stalinien reconverti dans la gauche caviar, fustigeait les chômeurs coupables de ne pas créer leurs entreprises et morigénait ces salauds de pauvres coupables d’être des assistés ; merci à Terra Nova, le think tank de cette gauche de droite qui, en 2012, faisait circuler une note stipulant qu’il fallait abandonner les ouvriers, le prolétariat, les précaires au Front national, où ils étaient de toute façon déjà partis (la faute à qui ? À ces gens-là...) pour se concentrer sur un autre cœur de cible comme on dit : le peuple de substitution issu de la pensée structuraliste - homosexuels, LGBT, immigrés, fumeurs de pétards, les bobos contre les prolos ; merci à cette gauche qui, en bon soldat du capitalisme soucieuse de disposer d’une main d’œuvre bon marché, a adoubé l’immigration comme « une chance pour la France » et qui a généré cette hyper-prolétarisation d’un monde dont l’avant-garde a imaginé le salut dans un islam politique ennemi de la liberté, de l’égalité, de la fraternité, de la laïcité, du féminisme ; merci à la gauche caviar et à la droite cassoulet, à l’époque Hollande et Chirac, puis Sarkozy, d’avoir méprisé le peuple quand, en 2005, il a voté « Non » à la formule libérale de l’Europe et qu’en 2008 ces branquignols lui ont tout de même imposé cette Europe en mobilisant les représentants du peuple contre le peuple, ce qui fut perçu par les nonistes comme un coup d’État, un véritable déni de démocratie ; merci aussi à tous les va-t-en guerre qui, derrière BHL, Kouchner, Pierre Bergé, Valls, tous ralliés à Macron, ont justifié et légitimé toutes les guerres qui ont détruit des États laïcs musulmans comme l’Irak et la Libye. Ces guerres ont généré une anarchie à l’origine des flux migratoires partout en Europe, de milliers de morts en Méditerranée, et de quatre millions de morts musulmans sur la planète ; merci à Pierre Bergé qui a clairement dit que les femmes pauvres n’avaient qu’à louer leurs utérus aux riches qui voulaient acheter un enfant et qu’il s’agissait d’un progrès de gauche...
On comprend qu’aucun de ceux qui ont ainsi rendu possible Marine Le Pen ne puisse faire autre chose que la transformer en diable alors qu’ils ont nourri consciencieusement ce démon qu’ils prétendent haïr depuis un quart de siècle, mais qui leur est bien utile pour obtenir que la présidence de la République soit toujours assurée par l’un des leurs - un ami du capital...
Pour ma part, je n’ai rien soutenu en vingt-cinq ans qui l’ait rendue possible...
En 2002, vous aviez refusé de défiler en compagnie « du patronat et de l’Evêché » contre Jean-Marie Le Pen. Vous pensez que les manifestations et le front républicain ne sont pas efficaces ?
Tout ce petit monde joue à se faire peur et à faire peur et je ne suis pas du genre à avoir peur d’autre chose que de ce qui le mérite. Quand un candidat se trouve au second tour des présidentielles face à Le Pen, il est sûr d’être élu. Cette consultation est devenue une élection à un tour. Voilà pourquoi toute cette clique a besoin de cette femme et fait tout ce qu’il faut pour qu’elle soit présente au second tour.
Quant à l’appellation « front républicain », elle mérite au moins une remarque : quelles leçons républicaines ont à nous donner ceux qui ont tenu pour nul et non avenu un référendum qui ne leur convenait pas ? J’en vois peu qui sont habilités à donner des leçons de républicanisme dans ce fameux front...
Vous avez rédigé un carnet de campagne, La cour des miracles, (Éditions de l’observatoire) qui sortira au mois de mai. Comment qualifier cette campagne ?
Pitoyable, minable, nulle... Les véritables questions n’ont jamais été abordées : qui a parlé d’identité nationale ? De l’avenir de notre civilisation ? De propositions géostratégiques permettant de replacer la France dans le monde ? De projets haut-de-gamme pour notre pays dans le prochain quart de siècle ? Personne...
J’avais prédit sans grand risque que cette élection permettrait de changer d’homme mais pas de politique - qui est peu ou prou la même depuis 1983. Ce fut d’ailleurs la raison de mon abstentionnisme - pas question de voter pour une élection dont le résultat est connu à l’avance. Je ne me suis hélas pas trompé...
Diriez-vous que l’émotion, la morale, l’indignation ont pris le pas sur le raisonnement et l’art politique ?
Je dirais que cette présidentielle est une formidable machine à faire vendre du papier journal et du taux d’audience médiatique aux publicitaires. Pour ce faire, il faut la construire comme un feuilleton de télé-réalité sur le principe christique : annonciation (dépôt des candidatures), nativité (entrée dans les sondages), apparition (y compris sous forme d’hologramme...), prophéties (programmes), sermons (chiffrages de programme), prédications (le paradis sur terre en cas d’élection), homélies, prêches, procès (vestons offerts, attachés parlementaires payés pour autre chose, voitures de fonction après avoir quitté la fonction, piston pour les enfants, déclarations de fortune à trou...), tribunaux (médiatiques), condamnation (les « unes » de presse), crucifixion (cathodique), crachats (enfarinage, concerts de casseroles, jets d’œufs), passion (jour du scrutin), résurrection (élection) - avant le retour d’un nouveau prophète qui voudra être vizir à la place du vizir...
Mais tout cela est une fable. L’essentiel est ailleurs. Le Capital met en scène ces diversions qui lui permettent de rester dans l’ombre et d’oeuvrer à sa tâche tranquillement. Le lundi, c’est jour de reprise ; et rien n’a changé.

Deux réactions, après le consternant « débat » :

04/05/2017 11:52 PAR JEAN-MARC CONSTANT
Ce n’était pas un débat entre deux conceptions d’essence différente que l’on a vu hier soir, mais un combat absurde comme l’opposition des deux mâchoires d’un étau, entre deux entités d’une même logique : la réunion physique (le « corps à corps ») de l’Effet avec la Cause servie « en même temps » sur un même plateau. Un aspect « match de catch » avec tout l’artifice requis destiné à nous la jouer sur le mode différence. Quand MLP envoie à EM qu’il ne fait que défendre le plus fort, qui pourrait dire le contraire ? Seulement le boomerang revient illico en pleine poire de la valseuse de Vienne, héritière du GUD, Occident et autres doux nervis. On s’en voudra du plaisir malsain ressenti parfois à l’énoncé de ce genre de vérités multipliables par deux, déplorant surtout amèrement que notre pays en soit là, à choisir entre la mort ou le coup à échéance mortel.

CAUSEUR : MACRON-LE PEN : INDIGNES !
04-05-2017
Un débat à la hauteur de la campagne qui l’a précédé
On aurait aimé en plaisanter. On aurait aimé dire qu’on attendait patiemment que l’un des deux protagonistes explique à l’autre quelle était sa recette du pot au feu, comme dans le film La gueule de l’autre.
Mais à vrai dire, on n’a pas le cœur d’en plaisanter. Car il devait s’agir du débat entre deux personnalités concourant pour la magistrature suprême de la cinquième puissance mondiale. Au lieu de cela, nous avons assisté à un spectacle indigne. Même un débat sur une chaîne info en plein été à onze heures du soir entre éditorialistes de troisième zone aurait été de meilleure qualité.
Ce débat était à l’image de cette « recomposition low-cost » dont nous avons ici décrit la mise en place. La véritable recomposition avait trop attendu. Elle disposait, au moment où elle devait intervenir, sans doute il y a quinze ou vingt ans, de personnalités à la hauteur, cultivées et complexes. Les vieux partis, accrochés à leurs prébendes, l’ont retardée avant de subir l’énorme échec du premier tour de cette élection présidentielle. Nous en récoltons le résultat : une foire d’invectives entre deux personnages caricaturaux et manifestement indignes de la fonction présidentielle.
L’abstention leur dit merci !
Mais que pouvions-nous attendre d’autre, au terme de la pire campagne présidentielle de la Ve République, naviguant entre le pathétique et le grotesque ? Après le débat, les journalistes sur les plateaux avaient beau jeu de fustiger ce spectacle affligeant. Notre presse ne fut guère à la hauteur et a contribué grassement à la mise en scène de ce naufrage du débat public. Rappelons-nous l’émission-phare du service public de télévision, « L’Emission politique », avec ses invités-mystères, ses clashs prémédités et son cynique et irresponsable Monsieur Loyal, David Pujadas. Ce dernier avait d’ailleurs l’eau à la bouche avant le face-à-face d’hier soir, en empruntant à la sémantique du commentaire sportif.
On peut prévoir que l’abstention ne soit pas découragée dimanche prochain après l’écoeurement suscité par cette foire d’empoignes. Reste à savoir quel camp sera le plus démobilisé. Quel que soit le vainqueur, même si Emmanuel Macron semble le plus probable, on peut légitimement se demander s’il est raisonnable de lui envoyer une majorité à l’Assemblée nationale. Nous en sommes là : voir dans une France ingouvernable un moindre mal. Et tout cela dans un monde dangereux. Hier soir, je me suis souvenu de Philippe Séguin posant il y a bien longtemps le diagnostic sur notre démocratie malade et sur notre crise morale. Nous sommes en phase terminale.
Source :
David Desgouilles Blogueur et romancier. - Publié le 04 mai 2017 / Politique (http://www.causeur.fr/debat-macron-le-pen-presidentielle- 44132.html)http://www.causeur.fr/debat-macron-le-pen- presidentielle-44132.html (http://www.causeur.fr/debat-macron-le- pen-presidentielle-44132.html)

Sur la nature du libéralisme actuel, un texte de l’an dernier, plus que jamais d’actualité :

« Libéralisme et fascisme constituent les deux versants profondément interconnectés du système mondial capitaliste. » Nancy Fraser, philosophe

 LE NÉOLIBÉRALISME EST UN FASCISME

Manuela Cadelli,
présidente de l’Association Syndicale des Magistrats de Belgique

Mis en ligne jeudi 3 mars 2016, 10h02
La carte blanche de Manuela Cadelli, présidente de l’Association syndicale des magistrats.

Le temps des précautions oratoires est révolu ; il convient de nommer les choses pour permettre la préparation d’une réaction démocrate concertée, notamment au sein des services publics.
Le libéralisme était une doctrine déduite de la philosophie des Lumières, à la fois politique et économique, qui visait à imposer à l’Etat la distance nécessaire au respect des libertés et à l’avènement des émancipations démocratiques. Il a été le moteur de l’avènement et des progrès des démocraties occidentales.

Le néolibéralisme est cet économisme total qui frappe chaque sphère de nos sociétés et chaque instant de notre époque. C’est un extrémisme.
Le fascisme se définit comme l’assujettissement de toutes les composantes de l’État à une idéologie totalitaire et nihiliste.
Je prétends que le néolibéralisme est un fascisme car l’économie a proprement assujetti les gouvernements des pays démocratiques mais aussi chaque parcelle de notre réflexion. L’État est maintenant au service de l’économie et de la finance qui le traitent en subordonné et lui commandent jusqu’à la mise en péril du bien commun.

L’austérité voulue par les milieux financiers est devenue une valeur supérieure qui remplace la politique. Faire des économies évite la poursuite de tout autre objectif public. Le principe de l’orthodoxie budgétaire va jusqu’à prétendre s’inscrire dans la Constitution des Etats. La notion de service public est ridiculisée.
Le nihilisme qui s’en déduit a permis de congédier l’universalisme et les valeurs humanistes les plus évidentes : solidarité, fraternité, intégration et respect de tous et des différences. Même la théorie économique classique n’y trouve plus son compte : le travail était auparavant un élément de la demande, et les travailleurs étaient respectés dans cette mesure ; la finance internationale en a fait une simple variable d’ajustement.

Déformation du réel
Tout totalitarisme est d’abord un dévoiement du langage et comme dans le roman de Georges Orwell, le néolibéralisme a sa novlangue et ses éléments de communication qui permettent de déformer le réel. Ainsi, toute coupe budgétaire relève-t-elle actuellement de la modernisation des secteurs touchés. Les plus démunis ne se voient plus rembourser certains soins de santé et renoncent à consulter un dentiste ? C’est que la modernisation de la sécurité sociale est en marche.
L’abstraction domine dans le discours public pour en évincer les implications sur l’humain. Ainsi, s’agissant des migrants, est-il impérieux que leur accueil ne crée pas un appel d’air que nos finances ne pourraient assumer. De même, certaines personnes sont-elles qualifiées d’assistées parce qu’elles relèvent de la solidarité nationale.

Culte de l’évaluation
Le darwinisme social domine et assigne à tous et à chacun les plus strictes prescriptions de performance : faiblir c’est faillir. Nos fondements culturels sont renversés : tout postulat humaniste est disqualifié ou démonétisé car le néolibéralisme a le monopole de la rationalité et du réalisme. Margaret Thatcher l’a indiqué en 1985 : « There is no alternative ». Tout le reste n’est qu’utopie, déraison et régression. Les vertus du débat et de la conflictualité sont discréditées puisque l’histoire est régie par une nécessité.
Cette sous-culture recèle une menace existentielle qui lui est propre : l’absence de performance condamne à la disparition et dans le même temps, chacun est inculpé d’inefficacité et contraint de se justifier de tout. La confiance est rompue. L’évaluation règne en maître, et avec elle la bureaucratie qui impose la définition et la recherche de pléthore d’objectifs et d’indicateurs auxquels il convient de se conformer. La créativité et l’esprit critique sont étouffés par la gestion. Et chacun de battre sa coulpe sur les gaspillages et les inerties dont il est coupable.

La Justice négligée
L’idéologie néolibérale engendre une normativité qui concurrence les lois du parlement. La puissance démocratique du droit est donc compromise. Dans la concrétisation qu’ils représentent des libertés et des émancipations, et l’empêchement des abus qu’ils imposent, le droit et la procédure sont désormais des obstacles.
De même le pouvoir judiciaire susceptible de contrarier les dominants doit-il être maté. La justice belge est d’ailleurs sous-financée ; en 2015, elle était la dernière d’un classement européen qui inclut tous les états situés entre l’Atlantique et l’Oural. En deux ans, le gouvernement a réussi à lui ôter l’indépendance que la Constitution lui avait conférée dans l’intérêt du citoyen afin qu’elle joue ce rôle de contre-pouvoir qu’il attend d’elle. Le projet est manifestement celui-là : qu’il n’y ait plus de justice en Belgique.

Une caste au-dessus du lot
La classe dominante ne s’administre pourtant pas la même potion qu’elle prescrit aux citoyens ordinaires car austérité bien ordonnée commence par les autres. L’économiste Thomas Piketty l’a parfaitement décrit dans son étude des inégalités et du capitalisme au XXIe siècle (Seuil 2013).
Malgré la crise de 2008, et les incantations éthiques qui ont suivi, rien ne s’est passé pour policer les milieux financiers et les soumettre aux exigences du bien commun. Qui a payé ? Les gens ordinaires, vous et moi.
Et pendant que l’État belge consentait sur dix ans des cadeaux fiscaux de 7 milliards aux multinationales, le justiciable a vu l’accès à la justice surtaxé (augmentation des droits de greffe, taxation à 21 % des honoraires d’avocat). Désormais pour obtenir réparation, les victimes d’injustice doivent être riches.
Ceci dans un Etat où le nombre de mandataires publics défie tous les standards mondiaux. Dans ce secteur particulier, pas d’évaluation ni d’études de coût rapportée aux bénéfices. Un exemple : plus de trente ans après le fédéralisme, l’institution provinciale survit sans que personne ne puisse dire à quoi elle sert. La rationalisation et l’idéologie gestionnaire se sont fort opportunément arrêtées aux portes du monde politique.

Idéal sécuritaire
Le terrorisme, cet autre nihilisme qui révèle nos faiblesses et notre couardise dans l’affirmation de nos valeurs, est susceptible d’aggraver le processus en permettant bientôt de justifier toutes les atteintes aux libertés, à la contestation, de se passer des juges qualifiés inefficaces, et de diminuer encore la protection sociale des plus démunis, sacrifiée à cet « idéal » de sécurité.

Le salut dans l’engagement
Ce contexte menace sans aucun doute les fondements de nos démocraties mais pour autant condamne-t-il au désespoir et au découragement ?
Certainement pas. Voici 500 ans, au plus fort des défaites qui ont fait tomber la plupart des Etats italiens en leur imposant une occupation étrangère de plus de trois siècles, Nicolas Machiavel exhortait les hommes vertueux à tenir tête au destin et, face à l’adversité des temps, à préférer l’action et l’audace à la prudence. Car plus la situation est tragique, plus elle commande l’action et le refus de « s’abandonner » (Le prince, chapitres XXV et XXVI).
Cet enseignement s’impose à l’évidence à notre époque où tout semble compromis. La détermination des citoyens attachés à la radicalité des valeurs démocratiques constitue une ressource inestimable qui n’a pas encore révélé, à tout le moins en Belgique, son potentiel d’entraînement et sa puissance de modifier ce qui est présenté comme inéluctable. Grâce aux réseaux sociaux et à la prise de parole, chacun peut désormais s’engager, particulièrement au sein des services publics, dans les universités, avec le monde étudiant, dans la magistrature et au barreau, pour ramener le bien commun et la justice sociale au cœur du débat public et au sein de l’administration de l’État et des collectivités.
Le néolibéralisme est un fascisme. Il doit être combattu et un humanisme total doit être rétabli.

Pour finir, en complément du texte qui précède, ce rappel indispensable du fait évident que dans le monde actuel les pouvoirs même quand ils se disent démocratiques n’informent pas, ils communiquent et manipulent :

 La "Fabrique du consentement" et la démocratie



Dans Public Opinion (1922), Lippmann étudie la manipulation de l’opinion publique.
Selon lui, pour « mener à bien une propagande, il doit y avoir une barrière entre le public et les évènements » Il décrit alors l’avenir qu’il entrevoit. Il conclut que la démocratie a vu la naissance d’une nouvelle forme de propagande, basée sur les recherches en psychologie associées aux moyens de communications modernes. Cette propagande implique une nouvelle pratique de la démocratie. Il utilise alors l’expression « manufacture of consent » qui signifie littéralement la « fabrique du consentement :

"Le peuple est un troupeau égaré, bien trop émotif, incapable de s’occuper de ses propres affaires, et qui doit-être encadré, contrôlé et conduit par une avant garde, une élite de décideurs éclairés.
Les gens doivent être détournés vers des buts inoffensifs.
Il faut les noyer sous une masse d’informations qui ne leur laisse pas le temps de réfléchir.
Il faut les persuader qu’ils sont incapables de provoquer des changements, il faut les convaincre que la révolte entraîne toujours le pire.
Il faut les faire voter de temps à autre, leur donner l’illusion de décider, l’illusion nécessaire."
 
*Walter Lippmann né à New York le 23 septembre 1889, mort le 14 décembre 1974, penseur et commentateur politique américain.