SORDIDES OU MÉDIOCRES ? LES DEUX, MON GÉNÉRAL !
Par Alain Sagault, vendredi 4 juillet 2014 à 16:42 :: LE GLOBE DE L’HOMME MOYEN ::#10592
« Quel peuple rend l’amour qu’on lui donne, sinon à qui le trompe et le flagorne, et ne le méritant pas n’en est que plus aimé ? »
André Suarès, Lord Spleen en Cornouailles
Je cultive mon jardin.
Les roses ont des épines, mais leurs fleurs et leur parfum me sont raisons de vivre et d’espérer.
Pour autant, même contre elle, on est de son époque.
Il faut donc bien la vivre, aussi, jusque dans ses cloaques. Et Dieu sait que les égouts de ce temps ne sentent pas la rose !
Je n’y peux rien, j’aime trop la beauté pour ne pas détester la laideur, pas tant celle du corps que celle de l’âme. Plus que jamais dénoncer et combattre la laideur destructrice des hommes et des femmes de pouvoir, de paraître et de profit, ces tumeurs ambulantes qui corrompent tout ce qu’elles touchent.
Un Sarkozy ne peut tromper que ceux qui lui ressemblent, et malheureusement ils sont nombreux à être aussi profondément médiocres, aussi viscéralement lâches, et au fond aussi désespérément puérils que celui qu’avec une grande perspicacité ils élisent pour les représenter.
Il est des êtres dont la laideur intérieure se voit littéralement sur leur visage, transparaît dans chacun de leurs mouvements, déforme chacune de leurs expressions et s’exprime malgré eux dans leur voix.
Ils sont loin d’être la majorité, mais ils la séduisent parfois un temps car dans les débuts rien n’est plus reposant que de se laisser aller à la bassesse.
Je me faisais ces réflexions après avoir entendu sur France-Inter un de ces être vils qui déshonorent la politique et dont le discours, répugnant dans la forme autant que dans le fond, me donne à tout instant envie de vomir.
Un adjectif définit parfaitement l’attitude et les propos de Nathalie Kosciusko-Morizet sur France-Inter hier : sordide. L’écoutant, j’entendais la voix de son maître : ce n’était qu’insinuations perfides, et non seulement perfides, mais malhonnêtes, et sciemment, volontairement, malhonnêtes, approximations, demi vérités et mensonges grossiers.
« Je ne sais pas s’il y a un cabinet noir à l’Élysée, mais… » ânonnait-elle sans trêve.
En voilà une au moins qui a compris le message de l’infâme Basile du Barbier de Séville, ce parangon des lâches :
« La calomnie, Monsieur ? Vous ne savez guère ce que vous dédaignez ; j’ai vu les plus honnêtes gens près d’en être accablés. Croyez qu’il n’y a pas de plate méchanceté, pas d’horreurs, pas de conte absurde, qu’on ne fasse adopter aux oisifs d’une grande ville, en s’y prenant bien : et nous avons ici des gens d’une adresse ! ... D’abord un bruit léger, rasant le sol comme hirondelle avant l’orage, pianissimo murmure et file, et sème en courant le trait empoisonné. Telle bouche le recueille, et piano, piano vous le glisse en l’oreille adroitement. Le mal est fait, il germe, il rampe, il chemine, et rinforzando de bouche en bouche il va le diable ; puis tout à coup, on ne sais comment, vous voyez calomnie se dresser, siffler, s’enfler, grandir à vue d’œil ; elle s’élance, étend son vol, tourbillonne, enveloppe, arrache, entraîne, éclate et tonne, et devient, grâce au Ciel, un cri général, un crescendo public, un chorus universel de haine et de proscription. Qui diable y résisterait ? »
Quel mépris des autres, et, au fond, quel mépris de soi-même !
Sarkozy, trader de la politique désormais has been, peut prendre sa retraite, il a formé une élève qui promet de dépasser le maître.
Dans la laideur, mais aussi dans le grotesque (étonnant comme le discours de ces malfaisants se retourne contre eux pour les dépeindre comme ils sont, au moment même où pour mieux masquer leur déchéance ils tentent d’attribuer leurs tares à autrui).
Comme la tache de sang sur la main de lady Macbeth, la médiocrité toujours refait surface : ce qui, après le haut-le-cœur, frappait l’esprit, c’est l’extraordinaire sottise, l’insondable médiocrité de la « prestation » de cette prétendue « bête politique ».
Comment, si taré soit-il, un politicien à l’époque de l’internet peut-il encore s’imaginer convaincre avec des ruses aussi cousues de fil blanc, des procédés rhétoriques aussi éculés ? Quand elle se fait aussi visible, la malhonnêteté intellectuelle devient risible.
Et ce sont ces gens-là qui vont pourfendant le populisme et la démagogie !
Pendant ces quelques minutes, Nathalie Kosciusko-Morizet a sans cesse utilisé le mot « évidence », sans doute, parce qu’elle sentait bien que son discours était tout sauf évident.
Après cette performance, il est une « évidence » qui ne lui échappera sans doute pas si elle prend la peine de visionner son enregistrement : quand on se la joue Messaline, il arrive qu’on se révèle Bécassine…
Histoire de souligner le contraste, et à l’intention de ceux de mes lecteurs qu’incommoderait cette « évidence » que NKM et ses propos ne sentent pas la rose, je cueille, dans le livre que j’ai commis récemment en compagnie de ma merveilleuse amie Debbie Robertson, « Ubaye, vallée ouverte », un petit texte fleuri et tout pénétré des vœux pieux d’un humanisme sans doute dépassé, puisqu’il chante le respect de la vie et le sens de la parole donnée, que ce soit à autrui ou à soi-même :
Enfin, sur le fond de la « contre-attaque » sarkozyenne, voici la réponse d’une « dame », comme dirait le camarade Sarkozy, d’une magistrate, comme on dit quand on est un citoyen digne de ce nom, au délire paranoïaque intéressé de celui qui n’est jamais si vulgaire que quand il tente de jouer au grand seigneur, tant le contre-emploi saute aux yeux :
03/07/2014
Oui les juges ont des opinions politiques, non ce n’est pas ce qui les détermine
par Evelyne Sire-Marin. Vice président du TGI de Paris, et néanmoins syndiquée.
On apprend donc, avec la mise en examen d’un ancien Président de la République, pour la deuxième fois sous la 5ème République (après Jacques Chirac), que certains juges auraient des opinions politiques, et même pire, seraient syndiqués.
Nicolas Sarkozy, jetant sa cape de prestidigitateur sur les six affaires de trafic d’influence et de corruption dont les ombres se rapprochent, n’a qu’une chose à dire : rien sur le fond, tout sur le complot des juges rouges contre lui.
Nicolas Sarkozy quitte le tribunal de Bordeaux, où il vient d’être interrogé par les juges dans le dossier Bettencourt, le 22 novembre 2012. Photo Pierre Andrieu. AFP.
Puisque l’une des deux juges d’instruction appartient au syndicat de la Magistrature (on oublie d’ailleurs toujours l’autre juge d’instruction et l’intérêt de la co-désignation des juges pour éviter ce type d’attaques), tout est pipé.
Et d’en tirer une conséquence implicite qui a été peu développée : il aurait fallu, s’agissant de LUI, nommer deux juges non syndiqués. On n’est pas loin de ce que le Front National a lui-même toujours revendiqué dans son programme : l’interdiction du syndicalisme judiciaire et la dissolution du Syndicat de la Magistrature.
Imagine-t-on une démocratie où, avant de désigner des juges d’instruction pour suivre un dossier, on s’interrogerait sur l’opinion politique de chacun des magistrats ? Et comment faire ? La majorité des magistrats ne sont syndiqués ni à l’USM (l’Union syndicale des magistrats, syndicat majoritaire), ni au Syndicat de la Magistrature. Est-ce à dire qu’ils n’ont pas d’opinion politique ? Faut-il alors contrôler leurs votes pour la connaître ?
Les magistrats seraient bien les seuls. Les journalistes, les avocats, les policiers ont tous des convictions politiques, et personne ne pense que cela leur interdit d’être des professionnels irréprochables. Mais les juges, eux, devraient être des pages blanches, des cerveaux transparents, pour être impartiaux.
C’est ignorer, d’abord, que la majorité des affaires judiciaires nécessitent une technicité, une compétence juridique, qui n’a pas grand-chose à voir avec les convictions politiques personnelles du magistrat : juger qu’un enfant est ou non en danger, rendre une décision en matière successorale, contractuelle, commerciale, exige surtout de respecter (et de connaître) la multiplicité des textes en vigueur, et leur application jurisprudentielle. Difficile de dire si les auteurs de ces décisions judiciaires sont de droite ou de gauche.
Et les juges pénaux ? Ils représentent moins d’un dixième des 9000 magistrats, et captent toute la lumière médiatique. Les juges d’instruction, juges des libertés, juge d’application des peines, présidents de correctionnelle ou de Cour d’Assises, peuvent-ils être des citoyens, dotés d’une liberté d’opinion et d’expression ?
C’est en tout cas ce qu’affirme le code de déontologie des magistrats réalisé par le Conseil Supérieur de la Magistrature : "Le magistrat bénéficie des droits reconnus à tout citoyen d’adhérer à un parti politique, à un syndicat professionnel, ou à une association et de pratiquer la religion de son choix."
Mais quels que soient les engagements citoyens du magistrat, comment Monsieur Sarkozy, qui est avocat, peut-il ignorer que le code pénal et le code de procédure pénale, auxquels il a lui-même ajouté plus de 30 lois, enserrent les pouvoirs des juges dans un formalisme extrêmement strict, sans aucune possibilité d’interprétation personnelle, quelles que soient leurs convictions ?
La garde à vue par exemple, dont il estime qu’elle n’aurait pas dû s’appliquer à sa personne, concerne 800.000 personnes par an, parfois pour des infractions comme la vente de bouteilles d’eau à la sauvette, dont chacun pourra juger de la gravité au regard de qualifications comme le trafic d’influence ou la corruption, en toile de fond de l’affaire à l’origine de sa garde à vue, où l’on soupçonne des financements libyens de la campagne présidentielle de 2007, à hauteur de 50 millions d’euros.
Quant à la mise en examen, elle s’impose lorsqu’il existe des indices permettant de penser que quelqu’un a commis une infraction, notamment pour lui permettre d’accéder au dossier, et d’exercer toute une série de droits (droit de recours, demandes d’expertises, d’auditions, de confrontations…).
Si les savoureuses écoutes téléphoniques entre M. Sarkozy, son avocat et deux hauts magistrats, réalisé à partir de téléphones acquis au nom d’identités usurpées, et techniquement conçus pour échapper à la surveillance policière, ne sont pas des indices graves ou concordants de trafic d’influence justifiant, non pas une condamnation, mais une mise en examen pour continuer à enquêter, il vaut mieux décider de supprimer le juge d’instruction, comme le souhaitait un certain Nicolas Sarkozy.
La procédure pénale française est ainsi : des soupçons, et c’est la garde à vue ; des indices, et c’est la mise en examen ; des charges suffisantes d’avoir commis une infraction, et c’est le tribunal.
Nicolas Sarkozy en est à la deuxième étape, et personne ne peut dire si le dossier justifiera qu’il passe à la 3ème.
Personne, même pas les juges, qu’ils soient rouges ou bleus.
Histoire de compléter ma réponse aux deux commentaires de l’ami Klépal, j’ajoute ces quelques lignes de Suarès, sur lesquelles je suis tombé tout à l’heure en poursuivant la lecture de son essai sur Cervantès :
© Sagault 2014 pour les trois photos !
Cliquez sur elles pour les agrandir…
Commentaires
La qualité rédactionnelle de ce papier dépasse de loin, de très loin, celle des individus méprisables qui l’ont inspiré.
Je crains que la beauté formelle de l’écrin n’irradie un tant soit peu sur l’immonde épinglé, et en atténue par conséquent le caractère nauséabond. La merde ne mérite en aucun cas un bas de soie !
Il semble difficile de déposer un commentaire sur ce blogue. Les mystères de la technique sont aussi insondables que ceux de la religion !
Je réitère ce que j’ai tenté de déposer il y a quelques heures.
La qualité rédactionnelle de ce dernier papier me parait tout à fait hors de mesure avec son sujet. Allier l’élégance du style et la préciosité des images au sordide des situations et des personnages décrits ne peut que les enjoliver et en atténuer la pestilence.
Même dans un bas de soie, la merde reste de la merde. Elle ne mérite en rien l’anoblissement d’un bel écrin.
PLUS ILS SONT NULS ET PERVERS, MEILLEURS NOUS DEVONS TENTER D’ÊTRE…
1) Je veux dénoncer l’ignominie, et ceux qui en font systématiquement usage, et je le veux d’autant plus que ces pratiques, exacerbées par les drogues dures que sont la communication et le marketing, n’entraînent désormais à peu près plus aucune réaction, et semblent être littéralement passées dans les mœurs, admises comme normales et presque souhaitables.
Je refuse de trouver normal que le pouvoir soit aux mains de canailles aussi stupides qu’irresponsables (voir le ridicule Sapin et sa vanne à deux sous : « Mon amie, c’est la finance »), et je refuse tout autant leurs modes d’expression, qui sont une partie non négligeable de leur politique.
Anesthésiés, tétanisés, une grande partie des citoyens de ce pays s’enfoncent par je m’en foutisme individualiste, aveuglement volontaire ou lâche résignation, dans une soumission inconditionnelle à la mise en place de plus en plus claire d’une dictature mondiale des multinationales économico-financières.
C’est à mes yeux un devoir de démasquer la nature réelle de cette oligarchie partout où elle sévit, ce que fait par exemple admirablement Vananda Shiva dans un entretien publié ce matin par Médiapart.
2) Le bas de soie est là pour faire voir, par contraste, autant qu’il est en mon minuscule pouvoir, à ceux que ne dérange plus l’odeur de la merde, que la perfidie, la lâcheté et la perversité ne sont pas les seuls choix possibles en matière de réflexion et de débat politique. Comment mieux dénoncer la vulgarité et la laideur d’âme qu’en montrant qu’on peut parler, écrire et penser autrement qu’au niveau du cloaque, de façon personnelle et non mécanique, en respectant sa langue et en respectant son lecteur et soi-même ?
Bref, en faisant preuve d’un minimum d’honnêteté intellectuelle.
Je ne vois vraiment pas pourquoi je devrais descendre au niveau de NKM et me contraindre à une médiocrité qui chez elle me fait horreur.
C’est faire trop d’honneur à Bécassine que de parler comme elle.
Et l’ignorer, c’est lui laisser la parole, tout en sachant combien pervers et pernicieux est son discours.
Accessoirement, si j’ose dire, signaler que de très nombreux ténors (ô combien lourds en paroles et légers en réflexion !) de l’UMP, les Ciotti, les Estrosi, les Goasguen, les Guaino, et j’en passe, pensent et agissent en militants non inscrits du FN, ne me paraît pas inutile.
UMP et FN, même combat, Fillon et Le Pen junior, même programme, cela aussi, il faut le dire ! L’arbre du FN a trop longtemps servi à cacher la forêt de l’UMP.
Ce qui doit être combattu, c’est le néo-libéralisme mondialisé sous toutes ses formes.
Dénoncer la laideur, mais en beauté, c’est la dénoncer doublement…
1) Je veux dénoncer l’ignominie, et ceux qui en font systématiquement usage, et je le veux d’autant plus que ces pratiques, exacerbées par les drogues dures que sont la communication et le marketing, n’entraînent désormais à peu près plus aucune réaction, et semblent être littéralement passées dans les mœurs, admises comme normales et presque souhaitables.
Je refuse de trouver normal que le pouvoir soit aux mains de canailles aussi stupides qu’irresponsables (voir le ridicule Sapin et sa vanne à deux sous : « Mon amie, c’est la finance »), et je refuse tout autant leurs modes d’expression qui sont une partie non négligeable de leur politique.
Anesthésiés, tétanisés, une grande partie des citoyens de ce pays s’enfoncent par je m’en foutisme individualiste, aveuglement volontaire ou lâche résignation, dans une soumission inconditionnelle à la mise en place de plus en plus claire d’une dictature mondiale des multinationales économico-financières.
C’est à mes yeux un devoir de démasquer la nature réelle de cette oligarchie partout où elle sévit, ce que fait par exemple admirablement Vananda Shiva dans un entretien publié ce matin par Médiapart.
2) Le bas de soie est là pour faire voir, par contraste, autant qu’il est en mon minuscule pouvoir, à ceux que ne dérange plus l’odeur de la merde, que la perfidie, la lâcheté et la perversité ne sont pas les seuls choix possibles en matière de réflexion et de débat politique. Comment mieux dénoncer la vulgarité et la laideur d’âme qu’en montrant qu’on peut parler, écrire et penser autrement qu’au niveau du cloaque, de façon personnelle et non mécanique, en respectant sa langue et en respectant son lecteur et soi-même ?
Bref, en faisant preuve d’un minimum d’honnêteté intellectuelle.
Je ne vois vraiment pas pourquoi je devrais descendre au niveau de NKM et me contraindre à une médiocrité qui chez elle me fait horreur.
C’est faire trop d’honneur à Bécassine que de parler comme elle.
Et l’ignorer, c’est lui laisser la parole, tout en sachant combien pervers et pernicieux est son discours.
Accessoirement, si j’ose dire, signaler que de très nombreux ténors (ô combien lourds en paroles et légers en réflexion !) de l’UMP, les Ciotti, les Estrosi, les Goasguen, les Guaino, et j’en passe, pensent et agissent en militants non inscrits du FN, ne me paraît pas inutile.
UMP et FN, même combat, cela aussi, il faut le dire ! L’arbre du FN a trop longtemps servi à cacher la forêt de l’UMP.
J’ai ajouté en fin d’article un court texte de Suarès qui me semble compléter ma réponse aux deux commentaires de Jean Klépal…