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LA JOIE DE GOLCONDE

Le hasard, c’est ce qui devait arriver…

VIVRE LA PEINTURE, proclamais-je dans ma dernière intervention sur ce blog.
S’il est quelqu’un qui vit la peinture au sens où je l’entends, c’est bien mon ami Renzulli, qui fut aussi mon maître quand je décidai il y a 23 ans de vivre la peinture (ne pas confondre avec « vivre de la peinture », même si ces deux recherches ne sont pas forcément incompatibles).

Le hasard, c’est ce qui devait arriver…
Les beaux hasards vénitiens ont encore fait jouer leurs délicats ressorts secrets pour faire advenir les rencontres d’autant plus imprévues qu’espérées, et souvent en vain, qui font de cette ville entremetteuse la plus ensorcelante des dispensatrices de coups de foudre…
C’est donc à Venise que, lisant un des deux volumes d’écrits d’André Suarès récemment publiés par la collection Bouquins, j’ai vu venir à ma rencontre un texte inédit, écrit à Venise en juillet 1909, et qui m’a d’autant plus frappé que j’avais vu la veille dans l’antro de Franco Renzulli le tableau qu’il venait d’achever, une merveille à laquelle la photo, hélas ou plutôt heureusement, ne rend pas pleinement justice.
En somme, et pour utiliser le jargon à la mode, en une sorte de prophétie auto-réalisatrice, Suarès parlait de la peinture de Franco avant que Franco la peigne…
Voici donc le texte et la photo, en hommage à ces deux artistes qui me sont chers, et pour le très grand plaisir de les partager avec vous !

André Suarès, La joie de Golconde, Venezia, II, XXII

« Et voici poindre, là-bas, au bout de la ruelle sombre, une promesse d’or, un amas de trésors au plus loin d’un couloir, dans une cave, sous le jour d’un soupirail. La gondole se dirige sur le feu jaune de l’occident, dans un halo rouge, la lumière du soir. (…) Un immense désir me pousse de toucher à la fortune du couchant, de brasser les sequins et les rubis de la lumière. (…) à l’issue d’un long canal plein d’encre, la gondole noire s’alluma d’un seul trait à l’incendie du couchant, comme elle virait, dans une courbe silencieuse, sur le miroir incandescent de la Zuecca. (…) Et je me laisse porter, les yeux éblouis, sur la mer étincelante, la plaine aux moissons de pierres pulvérisées, qui va de Saint-Georges au Lido.
S’il est une ivresse des regards, l’illumination enivre mes prunelles. Je ne sais si je vois mon rêve, ou si je rêve ce que je vois. Comme un plongeur sous la cloche de l’océan, je suis immergé dans la clarté éblouissante. Au plein de ce doux incendie, je suis comme une paille dans une mine d’or fluide. Le brasier du ciel et les tisons des trois horizons coiffent d’une coupole d’incarnat la fournaise liquide où bouillonne le sang de la mer. Pensée de feu splendide ; je brûle avec fraîcheur dans les flammes de la lumière. À cette joie sublime de l’éblouissement, j’élève, dans la joie, des mains impériales, que la même pourpre du ciel illumine. J’entends monter et grandir le murmure d’une bénédiction, comme la fumée d’un encens qui bout. Je rayonne, je participe à ce triomphe. »

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